Biographie de Willy Nfor
J'ai quitté ma terre bien aimée, excusez mon français
François Bensignor, mars 94
Willy N'For est de ceux qui ont rêvé
et mis au monde le son africain des années 80. Doux
poète ingénu au jeu de basse racé, pulsif et
mélodique, amoureusement imbriqué dans le groove, il a
vécu les plus folles aventures et les plus grands
succès. Le voici en solo : Respect !
1956 : Willy naît à Limbè, petit port alors
situé au Nigéria. Au moment des indépendances,
la région vote pour son rattachement au Cameroun. Aujourd'hui,
Willy chante : Excusez mon français avec son bel
accent pidgin-english Dès l'école, la musique
l'emporte. Pendant les vacances, Willy et son groupe jouent dans une
boîte. Viennent les premières années de
bohème baignée de rumba zaïroise, highlife,
pop-rock et musiques nigérianes, avec Lapiro de
Mbanga et les autres
1975 : Coup de tête ! A deux heure du matin, Willy et un copain
prennent la route à pied vers le Nigéria. Cinq jours
plus tard, le ventre creux, ils sont à Onitsha, grande ville
de l'ex-Biafra à une heure d'avion de leur point de
départ. Des potes camerounais les accueillent et les font
engager dans l'orchestre militaire où ils jouent pour les
officiers. Un an plus tard, frustrés de ne pouvoir jouer pour
les civils, hostiles aux militaires, les Camerounais s'en vont
à Port Harcourt, delta du Niger, la région du
pétrole. Ils fondent les Mighty Flames . Un
patron leur fournit matériel et mini-bus en
échange de deux albums par an. Menu quotidien : soul, funk,
reggae
1981 : A nous Lagos ! Le patron ,
furibard, récupère son matos et fait boucler les
leaders Willy repart à zéro, rencontre Sonny
Okosuns , star et directeur de EMI à Lagos. Il passe
deux ans avec lui en studio et sur scène. Au
Nigéria, les gens piratent les disques, mais payent les
concerts. Un artiste peut tourner plus d'un an sans sortir du pays.
Les puissants viennent juste pour montrer combien ils sont riches.
L'important n'est pas combien ils donnent de fric sur scène,
mais le temps que ça dure, le nombre de billets et sur quel
rythme Un jour, j'en ai vu un donner les clés de sa Mercedes
à un artiste ! Pour la première fois, Willy
sort d'Afrique à l'occasion de concerts à New York.
1983 : Des Français tournent un film : la rencontre à
Lagos entre des musiciens européens et africains.
Entraîné par Kiala, Willy assure son rôle de
chanteur-bassiste-compositeur. La musique est bonne, originale :
Ghetto Blaster est né. Le
film terminé, vient l'idée d'une tournée
d'été en France. Ciao Lagos ! Tout le
monde s'installe à Paris sur une péniche et
décide de rester. Pendant ses cinq ans d'existence, le groupe
tourne beaucoup, enregistre un maxi et un album.
1986-90 : Willy, réputé parmi les meilleurs bassistes
africains de Paris, enregistre avec Mory
Kanté les trois albums qui portent le griot au sommet
de son succès : 10 Cola Nuts (1986), Akwaba
Beach (1987, avec Yéké
Yéké ), Touma .(1990). Il
l'accompagne sur toutes les scènes de sa tournée
mondiale. Le batteur napolitain Tulio de Piscopo le
réclame en Italie, où il joue notamment avec
David Sancious . On retrouve encore Willy aux
côtés de Charlélie Couture
pour une série de concerts.
1991-92 : Mbilia Bel , star zaïroise,
l'entraîne pour six mois d'une tournée en Afrique
australe : Kenya, Tanzanie, Ouganda, Zambie, Zimbabwe, Botswana,
Malawi, Comores C'est l'illumination ! Willy renoue avec des sons,
des instruments, des harmonies perdus dans sa mémoire. Une
inspiration neuve déferle sur ses compositions, faite de ch
urs et d'instrumentations traditionnelles. Ainsi se dessine la
matière essentielle de ce premier album solo de Willy
N'For :
J'ai découvert dans les musiques d'Afrique australe les
racines de la musique camerounaise. Ce disque est une étape
importante dans la recherche de ma véritable expression
musicale.
François Bensignor