BEETHOVA OBAS, MESSAGER D'HAITI
François Bensignor, déc. 94
Dans un pays pétri de culture vaudou, baptiser son fils en hommage à Beethoven, c'est
le prédestiner à la musique Peintre éclairé, en rupture avec le style naïf d'Haïti,
Charles Obas n'aura pourtant pas l'opportunité d'orienter l'éducation de son enfant.
En octobre 1969, alors que Beethova est âgé de quatre ans, il disparaît, victime de
la dictature de Duvalier.
Dix années plus tard, l'adolescent s'éprend de la guitare qui n'a jamais quitté l'atelier
de son père. Dès lors, la musique est sa vie. Mano Charlemagne, l'un des chefs de
file de la musique messagère , qui incite à réfléchir, à méditer -- dont la regrettée Toto Bissainthe, disparue en juin dernier, fut l'une des grandes figures -- le
prend comme guitariste. Cette chanson édifiante d'auteurs/compositeurs en phase avec
notre époque contemporaine porte un regard sans complaisance sur ceux qui s'acharnent
à maintenir le peuple haïtien dans la douleur et la misère. Elle s'inspire directement
de la musique du petit peuple, des mélodies, du phrasé spécifique utilisés par la
mambo
(prêtresse) lors des cérémonies vaudous.
Formé à l'école des grands, pour qui il écrit et compose, Beethova Obas s'affirme
aujourd'hui dans un style bien à lui : une voix tout en douceur et en finesse, qui
dénonce l'injustice et la violence aveugle. Bien que contraint à l'exil, le jeune
chanteur reste très attaché à son pays. Je suis avant tout Haïtien dans ce que j'écris ( )
Après le coup d'État de 1992, j'ai dû m'installer à New York. J'avais beaucoup à
faire à l'extérieur et vivre en Haïti demandait certains compromis que je refusais.
Je me considère comme un ambassadeur de la musique haïtienne, quelqu'un qui explique la réalité
de ce pays Le début de ma carrière s'est déroulé à Haïti. A 23 ans, j'ai commencé
à partir en tournée à l'extérieur. Mais je reste imprégné de la musique de mon pays, de ses plaisirs et de ses douleurs.
François Bensignor